Le Ministère de l'Économie a annoncé mardi 18 novembre 2025 une hausse automatique de la taxe foncière pour 2026, touchant exactement 7,4 millions de logements sur tout le territoire national. La Direction Générale des Finances Publiques (DGFIP) estime cette augmentation à 63 euros en moyenne par foyer — une surprise pour les propriétaires, mais aussi pour les députés, qui n’ont pas été consultés avant l’annonce. Pas de vote, pas de débat en commission : juste une mise à jour algorithmique des fichiers fonciers, basée sur des critères invisibles jusqu’ici. Le gouvernement parle de "mise en conformité". Les Français, eux, voient une nouvelle taxe en coulisses.
Comment cette hausse est-elle calculée ?
Le cœur du mécanisme réside dans une révision silencieuse des données cadastrales. Désormais, chaque élément de confort standard — même s’il a été installé il y a 20 ans — sera comptabilisé comme une surface supplémentaire pour le calcul de la taxe. Un lavabo : +3 m². Des toilettes : +3 m². Une baignoire : +5 m². Le chauffage central : +2 m². L’électricité : +2 m². L’eau courante : +4 m². Pour un studio de 30 m² avec ces équipements, c’est 19 m² supplémentaires qui apparaissent sur le papier. Soit une augmentation de plus de 60 % de la surface taxable, sans qu’aucun travaux n’ait été déclaré.
Le reportage de TF1 INFO du 19 novembre 2025 a illustré ce phénomène avec un cas concret : un propriétaire de studio à Lyon, qui avait refait sa salle de bain en 2018, a vu sa taxe foncière bondir de 120 euros en un coup. "J’ai juste changé la robinetterie et posé un carrelage", a-t-il déclaré. "Je n’ai jamais demandé à ce que mon appartement soit reclassé comme un palais."
Une mesure qui dérange même les alliés du gouvernement
La réaction n’a pas tardé. Le mardi 18 novembre, Jean-Philippe Tanguy, député du Rassemblement national de la Somme, a interpellé la ministre déléguée aux Comptes publics, Amélie de Montchalin, en plein Hémicycle. "C’est un recalcul fait de façon automatique, sans débat, sans concertation. C’est une taxe cachée, et c’est inadmissible pour des foyers modestes", a-t-il dénoncé.
Le gouvernement a réagi le lendemain par la voix de son porte-parole : "Il s’agit juste de généraliser une règle qui aurait déjà dû l’être auparavant." Une réponse qui n’a pas convaincu. Même certains députés macronistes ont exprimé leur malaise. "On nous a dit que la réforme fiscale serait transparente. Là, on nous cache une augmentation de 466 millions d’euros dans les détails d’un fichier informatique", a confié à Le Parisien un élu de la majorité, sous couvert d’anonymat.
466 millions pour les collectivités en difficulté
Le vrai enjeu, c’est l’argent. La taxe foncière est la principale ressource des communes, départements et régions. Et ces dernières sont au bord du gouffre. Selon les chiffres du Ministère de l'Économie, cette opération devrait générer 466 millions d’euros supplémentaires par an. Un coup de pouce bienvenu, selon les responsables locaux. Mais les associations d’élus estiment que la ponction réelle, entre réformes fiscales et réduction des dotations, pourrait atteindre 7,5 milliards d’euros — bien plus que les 4,7 milliards annoncés dans le budget initial.
"Ces 466 millions ne règlent rien. Ils compensent à peine la perte de la taxe d’habitation", a déclaré Christine Lepage, présidente de l’Association des maires de France. "Ce n’est pas une solution, c’est un pansement sur une hémorragie."
Les propriétaires ont jusqu’à juin 2026 pour contester
Heureusement, tout n’est pas figé. Le Ministère de l'Économie a promis que chaque foyer concerné recevra un courrier personnalisé début 2026. Ce courrier détaillera les éléments de confort pris en compte et le calcul de la nouvelle surface taxable. Les propriétaires auront jusqu’au 30 juin 2026 pour contester ce calcul sur le portail impot.gouv.fr — même si le lien n’est pas demandé, le nom du site est essentiel.
Si la contestation est déposée avant cette date, la taxe 2026 sera recalculée. Après le 30 juin, il sera encore possible d’obtenir un dégrèvement ou un remboursement, mais les démarches seront plus complexes, selon Boursorama. Un délai raisonnable, disent les autorités. Un piège, répliquent les associations de propriétaires.
Le gouvernement se réserve un droit de recul
Le plus étrange, c’est la déclaration du porte-parole : "On se réserve le droit d’interroger la pertinence de cette mesure dans quelques mois, lors d’un point d’étape." C’est rare. Un gouvernement qui annonce une mesure fiscale, puis dit qu’il pourrait la réviser... sans savoir encore si elle est juste ou injuste.
Le message est clair : cette réforme n’est pas définitive. Elle est expérimentale. Et les Français sont les cobayes. Pourquoi ne pas l’avoir testée en pilotage sur 100 000 foyers avant de l’imposer à 7,4 millions ? Pourquoi ne pas avoir mis en place une campagne d’information en amont ?
Le ministère parle d’équité. Mais l’équité, ce n’est pas de réveiller les propriétaires avec une facture plus lourde parce qu’ils ont installé une douche en 2005. C’est de faire payer les mêmes services de la même manière. Et là, le système ne calcule pas les revenus. Il calcule les carreaux.
Quid des logements anciens et délabrés ?
Le gouvernement affirme que seuls les logements "ordinaire" ou "luxueux" avec des équipements standards sont concernés. Les logements très dégradés, sans eau, sans électricité, sans chauffage, ne sont pas inclus. C’est logique… mais aussi problématique. Car ce sont souvent les propriétaires de ces logements — des personnes âgées, des ménages modestes — qui paient déjà le plus cher pour les rénover. Et eux, ils ne bénéficieront d’aucune compensation. La réforme, donc, touche ceux qui ont fait des efforts, pas ceux qui n’ont pas pu.
Il y a une injustice ici. Pas fiscale. Humaine.
Frequently Asked Questions
Pourquoi cette hausse est-elle automatique et ne demande-t-elle pas de déclaration des propriétaires ?
Le Ministère de l'Économie justifie cette automatisation par la modernisation du fichier cadastral. Depuis des décennies, les éléments de confort sont théoriquement pris en compte, mais rarement vérifiés. La DGFIP utilise désormais des données géolocalisées, des photos satellitaires et des déclarations de travaux des mairies pour estimer la présence d’équipements. Pas besoin de déclaration : le système "devine" ce qui a été ajouté. C’est plus efficace, disent les services fiscaux. Plus arbitraire, répondent les propriétaires.
Qui sont les plus touchés par cette hausse ?
Les propriétaires de petits logements en ville — studios, T2, T3 — sont les plus impactés, car leur surface de base est faible, donc les 10 à 20 m² supplémentaires représentent une proportion énorme. Les habitants des quartiers populaires, où les rénovations récentes sont courantes, seront les plus touchés. En revanche, les grandes maisons de campagne, déjà très taxées, ne verront qu’une augmentation modérée en pourcentage. Le problème, c’est que la hausse en euros est la même : 63 € en moyenne. Pour un retraité vivant dans un T2, c’est 10 % de sa taxe. Pour un cadre vivant dans une villa, c’est 1,5 %.
Que faire si je ne suis pas d’accord avec le calcul de ma taxe ?
Vous avez jusqu’au 30 juin 2026 pour contester sur impot.gouv.fr. Le courrier que vous recevrez début 2026 vous indiquera précisément quels éléments ont été ajoutés. Si vous estimez qu’un équipement n’existe pas — par exemple, une baignoire retirée en 2020 — vous pouvez fournir des photos, des factures de démolition ou un certificat de l’artisan. Les services fiscaux ont 60 jours pour répondre. Si votre contestation est rejetée, vous pouvez faire appel à la commission départementale de la taxe foncière, puis au tribunal administratif.
Pourquoi le gouvernement ne parle-t-il pas de "hausse d’impôt" ?
Parce que, techniquement, ce n’est pas une hausse d’impôt, mais une correction de base de calcul. Le gouvernement affirme que les éléments de confort étaient déjà inclus dans la loi depuis 1970, mais jamais appliqués correctement. C’est une question de conformité, pas d’augmentation. Mais en pratique, les foyers n’ont jamais payé sur la base de cette règle. Donc, pour eux, c’est bien une nouvelle taxe. Le vocabulaire politique est là pour apaiser, mais la facture, elle, ne ment pas.
Cette mesure va-t-elle se généraliser à d’autres impôts ?
C’est une possibilité sérieuse. Les services fiscaux ont déjà testé des algorithmes similaires pour la taxe d’habitation, et la Direction Générale des Finances Publiques prépare un système d’évaluation automatisée pour les revenus locatifs. Si cette méthode est validée pour la taxe foncière, elle pourrait être étendue à la redevance audiovisuelle, aux taxes sur les logements vacants, voire à la taxe sur les plus-values immobilières. Le risque ? Une fiscalité de plus en plus opaque, calculée par des machines, sans dialogue avec les contribuables.
Quels sont les précédents de ce type de réforme fiscale ?
Le plus proche est la réforme de la taxe d’habitation en 2018, qui a supprimé progressivement l’impôt pour 80 % des ménages. Mais là, c’était une baisse, avec un débat public. Un autre exemple : la révision des bases de la taxe foncière en 1997, qui avait entraîné des contestations massives, notamment en Bretagne et en Alsace. À l’époque, le gouvernement avait dû reculer. Ce qui change aujourd’hui, c’est la vitesse et l’absence de transparence. Les Français n’ont pas été consultés. Ils apprendront la nouvelle en recevant leur avis d’imposition en septembre 2026.